…L’aérostation pendant la guerre.
Le Petit Comtois du 2 février 1915
L’observation aérienne a été un des nerfs de la guerre en 1914-1918. Et, en dehors des reconnaissances par avion, les aérostats assuraient cela avec une grande utilité. Ballons captifs, ils servaient à hisser une nacelle d’observateurs à une altitude permettant d’embrasser un vaste espace. L’enveloppe des ballons est faite de grands carrés d’étoffe caoutchoutée. Le ballon est rendu captif par des câbles treuillés par des moteurs automobiles. Les observateurs vont souvent par deux dans une nacelle.
Le poste d’aérostier était particulièrement dangereux car exposé à une intervention aérienne et aux rafales de vent. Le Petit Comtois de ce 2 février relate la destruction d’un de ces ballons captifs allemands et souligne les graves blessures reçues par les officiers observateurs.
Le secteur géographique concerné par cet épisode guerrier englobe l’espace frontalier alsacien, suisse et français au Nord de Porrentruy. Cette zone frontalière a déjà fait l’objet de billets dans ce blog le 18 octobre 1914 ou le 5 décembre 1914. Dès le début du conflit, les autorités helvétiques signalaient ce tronçon frontalier comme le plus problématique à surveiller. (cf. billet du 21 août 1914).
Quant aux pilotes auteurs de cette attaque, ils venaient de Belfort. La ville disposait d’une escadrille depuis 1912, basée au Champ de Mars. C’est de là que partirent les trois avions, pilotés par des Anglais et qui attaquèrent la base et l’usine de zeppelins de Friedrichshafen.
Ci-dessous, un Blériot XI-2 au décollage sur le Champ de Mars de Belfort (extrait de Spot’aero). Au début de la guerre, les escadrilles BL 10 et BL 3 comptaient 12 aéroplanes.
Au début de a guerre, l’aérostation était de bien meilleure qualité côté allemand avec les Drachen (Drachenballon, cerf-volant ou ballon dragon). Ces ballons avaient déjà une forme de « saucisse » permettant de s’adapter au sens du vent et de résister à sa vitesse si elle ne dépassait pas 56 km/h. Pour autant, l’état-major ne les jugeait pas utiles lors de la guerre de mouvement et ils ne revinrent en grâce qu’avec la stabilisation du front. En janvier 1915, il n’y avait cependant que 9 ballons allemands sur le front occidental. C’est l’un d’eux qui est l’objet de l’attaque relatée dans le Petit Comtois du 2 février. Au début de la bataille de Verdun, le service d’aérostation allemand mit en œuvre 12 engins. Mais les DCA, canons de défense aérienne, avaient progressé et les observateurs se plaignaient des risques encourus.
Les aérostats français étaient sphériques jusqu’en décembre 1914 et même après. À cette date, Albert Caquot imite les Drachen allemands et les perfectionne au point que les ennemis adopteront ces améliorations pour leurs propres engins. Les Britanniques commandèrent aussi des ballons Caquot à l’usine de Chalais- Meudon pour leur marine.
Outre l’attaque et les tirs de canons, les aérostats craignaient les coups de vent imprévus, les bourrasques violentes. C’est pourquoi Caquot adapta des empennages gonflables à l’arrière et leur disposition selon un angle de 120° permettait de résister à des rafales de vent de 90 km/h et même, pus tard de 125 km/h.
(cf. photo extraite de Wikipédia)
Il y eut en France 75 Compagnies d’aérostiers
Les observateurs aérostiers étaient des dessinateurs, géomètres, architectes, capables de dessiner en perspective. Des artilleurs les rejoignirent à partir de fin 1915.
Le dessinateur Marcel Jeanjean, qui fit de nombreuses illustrations dans le journal la Baïonnette, a publié le dessin ci-contre en 1919 dans « Sous les Cocardes, scènes de l’aviation militaire », chez Hachette.
Il représente ce que put être le sort des officiers aérostiers quand leur ballon était détruit. Mais la scène ne peut qu’être postérieure à 1915 car il n’y eut pas de parachute pour les observateurs avant 1916.
Dans les progrès techniques dus à la guerre, on retient plus souvent les armes telles que le lance-flamme ou le char, mais il y’en eut beaucoup d’autres et tous n’étaient pas à but meurtrier direct.
Albert Caquot, capitaine aérostier au début de la guerre fait partie de ces ingénieurs qui permirent des progrès dans l’aéronautique. En 1918, il était devenu directeur technique de l’aviation militaire. L’homme était un grand scientifique, inventeur génial et désintéressé.