L’agonie de l’Empire colonial allemand réjouit le chroniqueur du Petit Comtois.

Le Petit Comtois du 22 décembre 1914

22_12_1914Lastret 1Sous le titre de Feuillets de guerre, le Petit Comtois commençait à publier une série de tribunes sur l’actualité, signée Louis Lastret. Sous ce pseudonyme se cache Georges Ricou, metteur en scène de théâtre et homme de Lettres.

Ses connaissances de l’histoire récente paraissent  solides et ses références habiles. Mais l’on reste dans l’article de propagande.

Son premier article vise à moquer le projet politique d’expansion mondiale allemande (Weltpolitik) et surtout la politique coloniale. Pour être concret et personnaliser cette politique, l’auteur l’attribue entièrement à Guillaume II. Même s’il ne décida pas de tout, il engagea lui-même son pays dans la Weltpolitik, bien avant 1914. Mais l’ambition commerciale des Konzern rejoignait celle de l’Empereur.

Fin 1914, étant en échec militaire dans ses colonies africaines, dans ses concessions chinoises ou ses archipels du Pacifique, étant d’autre part dans l’incapacité de rompre le blocus maritime anglo-français, l’Allemagne n’a plus la possibilité de cette politique mondiale. Son seul succès récent est l’alliance ottomane.

22_12_1914Lastret 2Lastret remonte aux affaires germano-françaises à propos du Maroc. Il évoque les coups de force allemands inaboutis de Tanger et d’Agadir. Il aurait pu noter que, depuis 1904, avec l’Entente cordiale, la France avait l’appui anglais en contrepartie du laisser-faire français pour l’Angleterre en Égypte. Toutefois, si le traité de 1911 accorda bien à la France un protectorat sur le Maroc, ce ne fut pas sans concessions et l’auteur aurait pu aussi, s’il avait voulu l’impartialité, rappeler les abandons territoriaux que fit la France au Cameroun au profit de l’Allemagne. En cette fin d’année 1914, au Kamerun, Anglais et Français affrontaient des troupes allemandes et indigènes (cf. billet du 21 octobre ) et le feraient jusqu’en 1916.

22_12_1914Lastret 3Les colonies allemandes d’Afrique sont assez rapidement  sous le contrôle des alliés à l’exception de l’Afrique orientale où une guérilla se prolonge jusqu’en novembre 1918.

En Chine, les Japonais ont pris la place des Allemands dans leur concession du Shandong comme à Tientsin.

Dans le Pacifique, les îles Samoa, les Mariannes et les Marshall, le nord de la Nouvelle-Guinée et des Salomon tombent aussi sous le contrôle des Japonais ou des Australiens et Néo-Zélandais.

En Afrique, tout n’est donc pas joué en ce mois de décembre 1914, mais la maîtrise des océans par les anglo-français laisse peu d’espoir aux Allemands.

22_12_1914Lastret 4Enfin, Lastret considère comme un échec pour l’Allemagne son alliance avec la Turquie car elle n’a pas conduit au soulèvement des pays musulmans colonisés contre leur métropole française ou anglaise. Il reprendra ce thème dans l’édition du 29 décembre  estimant que le sultan turc n’avait plus l’influence nécessaire pour appeler à la guerre sainte.

Revenant sur le cas égyptien (cf. extrait ci-dessus), il note que toute présence officielle turque est désormais liquidée. Et Français et Anglais reconnaissent mutuellement leur protectorat, sur le Maroc pour les premiers et sur l’Egypte pour les seconds. Cette entente franco-anglaise ira plus loin en 1916 avec les accords Sykes-Picot découpant le Moyen-orient au profit de ces deux puissances coloniales.

22_12_1914Lastret 5Au final, Louis Lastret a beau jeu d’ironiser sur les ambitions déçues de Guillaume II ; l’empire colonial allemand est liquidé ou sur le point de l’être.

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