Le Petit Comtois du 4 octobre 1914
La ville fonctionnait avec et pour les soldats : ceux des garnisons, en préparation et formation pour partir au front, et ceux des hôpitaux, blessés plus ou moins gravement. Le quotidien de nombreux Bisontins et Bisontines devait se passer dans ces hôpitaux et infirmeries pour leur travail ou bien pour donner un peu de leur temps afin d’aider et assister.
Dans l’édition du 20 août, Georges Graff s’était livré à un récit, une heure chez les blessés, dans lequel il avait fait preuve d’une propagande éhontée. Les blessés auraient été surtout allemands, méprisables, et les quelques Français rencontrés n’auraient aspiré qu’à repartir très vite au front. On était alors dans la période la plus forte de la censure et la plus abêtissante.
Le billet du 26 septembre mit en évidence comment l’arrivée de l’hiver mobilisait les bonnes volontés pour équiper chaudement les soldats (le paquet du soldat) et comment l’aide aux blessés était déjà la préoccupation de beaucoup, surtout que l’on comprenait de plus en plus que la guerre durerait.
Rappelons que la ville disposait de 4000 lits d’hôpital, vers le 20 septembre, après que différents lieux eussent été adaptés pour recevoir des blessés. Il y avait douze hôpitaux ou infirmeries à cette date et l’article ci-contre (deuxième extrait), en signale dix-sept le 4 octobre. Le nombre de lits a donc augmenté sans qu’on puisse préciser de combien.
La Société des Amis de l’Hôpital, déjà présentée avec d’autres associations dans l’édition du 25 août, a montré une certaine efficacité dans la collecte d’aides pour les blessés.
Elle rend compte, dans cette édition, d’une partie de son action : La distribution de vêtements et d’oreillers, celle de vivres et de gâteries diverses pour ces jeunes hommes, sucreries et boissons alcoolisées distribuées par des femmes, membres de l’association.
Chaque édition du journal multiplie les listes de donateurs. C’est encore le cas ce 4 octobre sous la rubrique de l’Union des Femmes de France (Croix Rouge) ou de la Société de secours aux blessés militaires.
La solidarité à l’égard des blessés étaient la plus importante, mais cependant elle ne se limitait pas à eux. Depuis août, des allocations apportaient aux familles les plus pauvres privées du salaire d’un homme sous les drapeaux, une aide modeste, mais complémentaire de ce qui relevait de la solidarité locale. Les chômeurs bénéficiaient eux aussi de l’entraide locale.
Durant ces premiers mois de guerre, le contenu de la page consacrée à la chronique régionale est ainsi largement attribué à ces actions solidaires. Que l’on ne s’y trompe pas, les Bisontins avaient sûrement leur lot de mesquins et de profiteurs (cf. billet à venir : 7 octobre). Les égoïsmes ne disparaissent pas avec la guerre, mais la compassion vis à vis des blessés était réelle et nombreuses étaient les familles qui avaient déjà reçu une lettre annonçant la blessure d’un proche, les poussant à être attentifs à ceux qui, sur place, connaissaient les mêmes souffrances.
L’extrait ci-dessous provient d’une lettre d’un sous-officier bisontin à sa famille, éditée par le Petit Comtois du 2 octobre 1914. Il a été blessé le lundi 14 septembre, dans l’Aisne.